Eric DESFOUGERES
Maître de conférences (H.D.R.) à l’Université de Haute-Alsace
Membre du CERDACC
Commentaire de CE 4 octobre 2021, Société Olympique de Marseille, n° 440428
Club sulfureux s’il en est, l’Olympique de Marseille, déjà tragiquement confronté à l’effondrement d’une tribune lors de la demi-finale de coupe de France au stade de Furiani, à Bastia, le 5 mai 1992, ayant fait 18 morts et 2 300 blessés (V. Claude Lienhard « Pour un droit des catastrophes » D. 1995 p. 91 – Xavier Prétot « La responsabilité pénale des fonctionnaires et agents publics. A propos de l’affaire du stade de Furiani » note sous Cass. crim. 24 juin 1997 RDP 1997 p. 1601 et ss.) s’est trouvé impacté par un autre drame, cette fois-ci, sur son propre terrain.
Il faut bien rappeler, en préalable, que le stade Vélodrome demeure bien, à ce jour encore, malgré un contrat de naming conclu en juillet 2016 entre le concessionnaire Arema et Orange, la propriété de la ville de Marseille. L’Olympique de Marseille en tant que club résident n’est donc qu’un locataire devant s’acquitter d’un loyer de 41 500 € par match, plus 0,63 € par spectateur lorsque l’affluence dépasse 25 000 personnes. Le club ayant à sa charge l’entretien des zones intérieures, la sécurité (avec le recrutement de stadiers, la rémunération des forces de l’ordre et pompiers) et la gestion des loges. En vertu d’un contrat, signé le 1er juillet 2009, pour deux ans, la ville s’était donc engagée à mettre l’enceinte à sa disposition, en vue de l’organisation de rencontres de football, tout en se réservant, la possibilité, de manière exceptionnelle, de conclure avec un autre contractant, pour la tenue d’autres événements, tels qu’un concert. C’est ce qu’elle fit pour la période du 15 au 21 juillet 2009 avec la société Live Nation France, en vue de la prestation de Madonna. C’est ainsi, que le 16 juillet 2009, à la suite de la défaillance de l’un des quatre treuils devant permettre de hisser la structure sur la scène, la structure métallique du toit, d’un poids de 60 tonnes s’effondra, écrasant au passage une grue et causant la mort de deux personnes et en blessant dix autres. Autre conséquence indirecte : le site se trouva indisponible le 16 août 2009, contraignant l’Olympique de Marseille à jouer son match face au Lille Olympique Sporting Club au stade de la Mosson, à Montpellier.
S’en est suivi toute une saga juridictionnelle. D’un point de vue pénal, le tribunal correctionnel de Marseille a, le 17 février 2021, relaxé trois prévenus et prononcé des peines allant jusqu’à deux ans de prison avec sursis contre la présidente de l’organisateur Live Nation France et les principaux prestataires, ainsi que des amendes allant de 10.000 0 150.000 €. D’un point de vue administratif, la société sportive professionnelle Olympique de Marseille a saisi le tribunal administratif de Marseille, afin de faire condamner la commune de Marseille pour être indemnisé du préjudice lié à l’indisponibilité du stade estimé à 1 003 325 €. Cette demande a été rejetée par jugement n° 1304062 du 23 mai 2017. Ce qu’a confirmé la cour administrative d’appel de Marseille par arrêt n° 17 MA0326 du 23 mai 2018. Les juges du fonds avaient, dans un premier temps, considéré que la décision de délocalisation avait été prise de manière unilatérale et irrévocable par l’Olympique de Marseille, la privant ainsi de toute possibilité de réparation. Cette sentence fut cassée par un arrêt du Conseil d’Etat n° 421909 du 24 avril 2019 pour dénaturation des pièces du dossier. Il se référait lui, en particulier, à une réunion tenue le 29 juillet 2009, en présence des personnes en charge de l’instruction et des représentants de la ville et du club et ayant conclu que du fait de l’enquête, le stade ne pouvait être mis à disposition pour le prochain match. L’affaire a dès lors été renvoyée devant la même juridiction d’appel qui par arrêt n° 19MA0218 du 6 mars 2020 (Franck Lagarde « Absence de responsabilité d’une commune en cas de force majeure : Jurisport avril 2020 p. 8) a maintenu sa position initiale, suscitant un nouveau pourvoi devant les juges du Palais Royal. En se basant sur l’article L. 821-2 du code justice administrative, ces derniers vont alors enfin pouvoir trancher l’affaire au fonds, en faveur du club marseillais. Le présent arrêt (V. parmi les premiers commentaires : Lucienne Erstein « Une force majeure pas assez extérieure pour exonérer la personne publique concédante de sa responsabilité contractuelle » : JCP G 2021 com. 1104 – Marie-Christine de Montecler « Quand l’administration est responsable de la faute de son cocontractant » : AJDA 11 octobre 2021 p. 1952 – Nathalie Mariappa « L’effondrement d’une structure scénique causant un accident mortel n’est pas un cas de force majeure » : Dalloz actualité 14 octobre 2021) fournit l’opportunité de rappeler plusieurs théories jurisprudentielles désormais bien ancrées, tant sur le principe même de l’obligation de réparation (I) que sur son application concrète (II).
I – Les fondements de mise en oeuvre de la responsabilité retenue
Il convenait d’écarter un certain nombre de fins de non-recevoir (A), avant de pouvoir dégager la solution finale (B).
A – La présence des conditions de recevabilité de la requête
La ville de Marseille soulevait d’abord un moyen de procédure, en estimant que le juge administratif ne s’était pas assuré que la personne ayant formé l’appel, avait la qualité pour représenter la société Olympique de Marseille. Ce qu’écarte rapidement le Conseil d’Etat se référant aux articles L. 225-64 et L. 225-66 du code de commerce visant les sociétés anonymes ayant opté pour une formule « à l’allemande » en se dotant d’un directoire et d’un conseil de surveillance, combiné avec l’article L. 122-2 relatif aux formes que peuvent sociétés sportives. Il en déduit logiquement que M. Jacques-Henri Eyraud, président du directoire, avait bien la qualité pour introduire le pourvoi, sans qu’il y ait lieu de vérification, étant donné qu’un représentant légal est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstances.
De même, la requête a bien été jugée suffisamment précise au sens de l’article R. 411-1 du code de justice administrative.
L’exigence de décision préalable, existant dès les origines du plein contentieux, dont le contentieux indemnitaire, évoqué dès la jurisprudence Cadot de 1889 et désormais reprise à l’article R. 421-1 du code de la justice était bien, en l’espèce, respectée du fait d’une demande adressée le 14 mars 2017 par l’Olympique de Marseille à la ville et demeurée plus de deux mois sans réponse, formant par conséquent une décision implicite de rejet.
B – L’absence d’exonération de la responsabilité contractuelle pour cas de force majeure
Afin d’expliciter sa position, le Conseil d’Etat décortique la convention passée entre l’Olympique de Marseille et la ville de Marseille et particulièrement l’article 4.1 en vertu duquel la ville prend les mesures appropriées pour que le stade puisse permettre l’organisation des rencontres officielles dans des conditions compatibles avec les normes impératives. Ce qui selon l’article 1 renvoie à toute réglementation ou normes impératives applicables aux enceintes sportives. Partant de là, il décèle un manquement à une obligation contractuelle.
L’arrêt semble s’inscrire, une nouvelle fois, dans la lignée des décisions des hauts magistrats administratifs se fondant sur la théorie de l’équivalence des conditions, suivant laquelle tous les événements ayant concouru à la réalisation du dommage et sans lesquels il ne se serait pas produit, en sont les causes. En effet, ils soulignent que bien que l’accident résulte d’une faute commise par l’organisateur du spectacle et ses sous-traitants lors du montage, il ne serait pas survenu sans la décision de mise à disposition. Il en tire la conséquence évidente que les circonstances ne sauraient être considérées comme un fait extérieur, qui aurait permis de retenir l’exonération de responsabilité contractuelle pour cas de force majeure. (V. observation sous le présent arrêt Lucienne Erstein « Une force majeure pas assez extérieure pour exonérer la personne publique concédante de sa responsabilité contractuelle » (obs. sous CE 4 oct. 2021 Sté sportive Olympique de Marseille) : JCP G 2021 com. 1104 et JCP A 2021 act. 596).
Cet arrêt est ainsi également fidèle à la parcimonie avec lequel les juridictions administratives – à l’instar des juridictions judiciaires – permettent de se libérer de la responsabilité en invoquant un évènement extérieur, imprévisible, irrésistible et insurmontable. (V. déjà pour des drames lors de moments festifs les nombreuses jurisprudences recensées dans notre contribution « La responsabilité administrative des collectivités territoriales confrontées au fait touristique » in Tourisme, sécurité et catastrophes (sous la direction de Bertrand Pauvert et Muriel Rambour) Paris : Institut Universitaire Varenne, coll. Colloque & Essais (Actes de la journée d’études organisée par le CERDACC à l’IPAG de Paris le 27 juin 2017) 2018, p. 168 et ss.). La cour d’appel avait, elle, considéré que la faute à l’origine de l’accident était étrangère à la ville de Marseille qui, n’ayant pas pris en charge le montage de la structure métallique était donc impuissante à le prévenir ou l’empêcher (V. le commentaire de Franck Lagarde « Absence de responsabilité d’une commune en cas de force majeure : Jurisport avril 2020 p. 8).
Restait encore à bien préciser la forme concrète qu’allait revêtir la réparation.
II – Les modalités de mise en oeuvre de la responsabilité retenue
La haute juridiction administrative admet la possibilité pour la cité phocéenne de s’adresser à l’organisateur du spectacle afin qu’il indemnise le club bleu et blanc en ses lieux et places (A) du montant fixé (B).
A – L’absence de moyens empêchant l’appel en garantie
Le Conseil d’Etat considère que demeurent valables les conclusions formulées, devant le juge administratif, par la commune de Marseille à l’encontre de la société Live Nation France, bien que celle-ci ne soit pas partie à l’instance et qu’elle n’ait pas fait l’objet d’une demande que l’on aurait pu envisager sur le plan extracontractuel de la part de l’Olympique de Marseille. A noter que les requérants s’étaient toutefois, fort prudemment, abstenu d’invoquer eux-mêmes la convention entre la ville et l’organisateur du concert, compte tenu des dissensions persistant dans la jurisprudence sur la possibilité des tiers de se prévaloir d’un manquement contractuel (V. Jérémy Bousquet « Le principe de la relativité de la faute contractuelle en droit administratif » : RFDA novembre/décembre 2018 p. 1041 – Guylain Clamour « Manquement contractuel et responsabilité quasi délictuelle, bis repetita (non) placent » (note sous CE 31 mars 2014 Union syndicale du Charvet, Union syndicale des Villards n° 360904) : AJDA 15 septembre 2014 p. 1725 – Guylain Clamour « Tiers et responsabilité(s) liée(s) au contrat public » in Mélanges Laurent Richer, 2013, Paris : Lextenso, p. 325 – Geneviève Viney « La responsabilité du débiteur contractuel, à l’égard des tiers : divergence de la jurisprudence entre le Conseil d’Etat et la Cour de cassation ? » (note sous CE 11 juillet 2011) : D. 2012 p. 653).
Il s’agissait ici d’une procédure permettant à une personne assignée de demander que lui soit substituée une autre dans les condamnations qui pourraient être prononcées contre elle. Prévue notamment à l’article 334 et suivants du Code de procédure civile, transposable en droit public, elle trouve principalement à s’appliquer dans le contentieux des ouvrages et travaux publics (V. par exemple Pascal Devillers « Dommages causés aux tiers : appel en garantie du maître par le constructeur » (obs. sous CE 6 février 2019 n° 2019-001655) : Contrats et Marchés publics avril 2019 p. 26).
La demande d’appel en garantie ayant été effectuée le 18 octobre 2016, soit moins de cinq ans après l’introduction de la requête de l’Olympique de Marseille, échappe à la forclusion prévue à l’article 2224 du code civil.
Du fait de l’article 6 de la convention de mise à disposition du stade Vélodrome pour le concert stipulant que la société organisatrice est responsable des dommages de toute nature pouvant survenir du fait ou à l’occasion de la convention, même s’ils relèvent, en réalité de sous-traitants. Ce qui pouvait laisser envisager d’autres actions récursoires.
C’est donc bien la totalité de la somme qui devrait pouvoir être récupérée par la commune de Marseille.
B – La présence de justificatifs permettant l’évaluation du préjudice
Le Conseil d’État s’efforce, par conséquent, de procéder à une juste indemnisation du préjudice réel, tout en demeurant soucieux de ménager, autant que possible, l’argent public,
Il part du postulat que la capacité du stade de la Mosson étant de 32 000 places, le nombre de spectateurs était notablement inférieur à ce qu’aurait pu accueillir le stade Vélodrome de près de 60 000 places à l’époque. Plus précisément, il se base sur l’affluence lors du match opposant l’Olympique de Marseille et l’Association de la Jeunesse Auxerroise le 17 août 2008, représentative, selon lui, de la fréquentation au stade Vélodrome sur cette période de l’année entre les années 2006 et 2010. Partant de là, il chiffre la perte liée à la vente de places à 308 780 € à laquelle se rajoutent 21 111 € de manque à gagner au titre des prestations de restauration.
A ce poste principal, s’agrègent les frais de déplacements et d’hébergement avérés, estimés eux à 2 819 € pour les salariés et stadiers et à 87 509 pour les supporters. Sont encore inclus 56 670 € correspondant aux dépenses publicitaires relatives à l’information autour de la délocalisation et à l’acheminement du matériel à Montpellier. La location du stade de la Mosson s’était élevée à 29 290 € et le recrutement de personnels intérimaires à Montpellier pour tenir les guichets ou prendre en charge des opérations de manutention à 18 860 €
En revanche, le Conseil d’Etat n’oublie pas de déduire des dommages et intérêts alloués 73 082 € du fait de la dispense de location du stade Vélodrome et refuse de prendre en compte le déficit d’exploitation de la boutique vendant des produits à l’effigie du club ou la perturbation dans la distribution de places gratuites, faute de justificatifs suffisant.
C’est donc au total au montant de 461 887, soit moins de la moitié de la somme initialement réclamée, que peut prétendre l’Olympique de Marseille à titre d’indemnisation de ce préjudice par ricochet, a priori, inédit.
Conseil d’État – 8ème – 3ème chambres réunies – 4 octobre 2021 – n° 440428
RÉSUMÉ :
24-01-02-01-01-03 Stade municipal mis à la disposition, dans la durée, d’un club sportif en vue de l’organisation de rencontres de football programmées et, exceptionnellement, d’un autre cocontractant en vue de l’organisation d’un concert. Accident mortel ayant été causé, au cours des opérations de montage de la scène de ce spectacle, par l’effondrement d’une structure métallique. Stade rendu par suite indisponible pour accueillir, un mois plus tard, une rencontre sportive programmée…….L’indisponibilité du stade, bien que résultant de fautes commises par le cocontractant de la commune et les sous-traitants de celui-ci dans le montage de la structure scénique, n’aurait pu survenir sans la décision initiale de la commune de mettre le stade à disposition de ce cocontractant pour l’organisation d’un concert…….Par suite, l’effondrement de la structure scénique et l’accident mortel qui s’en est suivi ne résultent pas de faits extérieurs à cette commune et, dès lors, ne constituent pas un cas de force majeure de nature à l’exonérer de toute responsabilité contractuelle vis-à-vis du club sportif.
39-03-03-01 Stade municipal mis à la disposition, dans la durée, d’un club sportif en vue de l’organisation de rencontres de football programmées et, exceptionnellement, d’un autre cocontractant en vue de l’organisation d’un concert. Accident mortel ayant été causé, au cours des opérations de montage de la scène de ce spectacle, par l’effondrement d’une structure métallique. Stade rendu par suite indisponible pour accueillir, un mois plus tard, une rencontre sportive programmée…….L’indisponibilité du stade, bien que résultant de fautes commises par le cocontractant de la commune et les sous-traitants de celui-ci dans le montage de la structure scénique, n’aurait pu survenir sans la décision initiale de la commune de mettre le stade à disposition de ce cocontractant pour l’organisation d’un concert…….Par suite, l’effondrement de la structure scénique et l’accident mortel qui s’en est suivi ne résultent pas de faits extérieurs à cette commune et, dès lors, ne constituent pas un cas de force majeure de nature à l’exonérer de toute responsabilité contractuelle vis-à-vis du club sportif.
60-04-02-03 Stade municipal mis à la disposition, dans la durée, d’un club sportif en vue de l’organisation de rencontres de football programmées et, exceptionnellement, d’un autre cocontractant en vue de l’organisation d’un concert. Accident mortel ayant été causé, au cours des opérations de montage de la scène de ce spectacle, par l’effondrement d’une structure métallique. Stade rendu par suite indisponible pour accueillir, un mois plus tard, une rencontre sportive programmée…….L’indisponibilité du stade, bien que résultant de fautes commises par le cocontractant de la commune et les sous-traitants de celui-ci dans le montage de la structure scénique, n’aurait pu survenir sans la décision initiale de la commune de mettre le stade à disposition de ce cocontractant pour l’organisation d’un concert…….Par suite, l’effondrement de la structure scénique et l’accident mortel qui s’en est suivi ne résultent pas de faits extérieurs à cette commune et, dès lors, ne constituent pas un cas de force majeure de nature à l’exonérer de toute responsabilité contractuelle vis-à-vis du club sportif.
60-05-01 Stade municipal mis à la disposition, dans la durée, d’un club sportif en vue de l’organisation de rencontres de football programmées et, exceptionnellement, d’un autre cocontractant en vue de l’organisation d’un concert. Accident mortel ayant été causé, au cours des opérations de montage de la scène de ce spectacle, par l’effondrement d’une structure métallique. Stade rendu par suite indisponible pour accueillir, un mois plus tard, une rencontre sportive programmée. Appel contractuel en garantie de la commune, condamnée à indemniser le club sportif, contre l’organisateur du spectacle…….1) Un appel en garantie formé par une personne publique moins de cinq ans après la requête par laquelle la victime a sollicité la mise à sa charge de l’indemnisation contre laquelle cette personne publique demande à être garantie n’est pas atteint par la prescription prévue par l’article 2224 du code civil…….2) Article 6 de la convention de mise à disposition du stade à l’organisateur de spectacle prévoyant la responsabilité de celui-ci pour les dommages de toute nature pouvant survenir du fait ou à l’occasion de l’exécution de cette convention. Par suite, nonobstant les manquements qui auraient pu être commis par les sous-traitants auxquels ce cocontractant a recouru pour le montage du dispositif scénique prévu pour la tenue du concert, il y a lieu d’accueillir les conclusions de la commune tendant à ce que ce cocontractant soit appelé en garantie…….3) En l’absence, au vu de l’instruction, de négligences de la commune de nature à atténuer les responsabilités incombant à son cocontractant en application de ces stipulations, ce cocontractant doit garantir la commune du montant total des sommes mises à sa charge.
TEXTE INTÉGRAL
ECLI : ECLI:FR:CECHR:2021:440428.20211004 Recours : Plein contentieux Publié au recueil Lebon RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Vu la procédure suivante : La société sportive professionnelle Olympique de Marseille a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune de Marseille à lui verser la somme de 1 003 325 euros, majorée des intérêts au taux légal ainsi que la capitalisation de ceux-ci, en réparation du préjudice qu’elle estime avoir subi du fait de l’indisponibilité du stade Vélodrome le 16 août 2009. Par un jugement n° 1304062 du 23 mai 2017, ce tribunal a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 17MA03262 du 23 mai 2018, la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté l’appel formé par la société Olympique de Marseille contre ce jugement.
Par une décision n° 421909 du 24 avril 2019, le Conseil d’Etat a annulé cet arrêt et renvoyé l’affaire devant la cour administrative d’appel de Marseille.
Par un arrêt n° 19MA02108 du 6 mars 2020, la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté à nouveau l’appel formé par la société Olympique de Marseille.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 6 mai 2020, 3 août 2020, 22 mars 2021 et 16 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la société Olympique de Marseille demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler cet arrêt ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Marseille la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– le code civil ;
– le code de commerce ;
– le code du sport ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Jonathan Bosredon, conseiller d’État,
– les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la société sportive professionnelle Olympique de Marseille et à Me Haas, avocat de la ville de Marseille ; Considérant ce qui suit :
- Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune de Marseille a conclu le 1er juillet 2009 avec la société sportive professionnelle Olympique de Marseille une convention de mise à disposition du stade Vélodrome, valable pour la période du 1er juillet 2009 au 30 juin 2011, en vue de l’organisation des rencontres de football programmées du club de l’Olympique de Marseille. La commune de Marseille a également conclu avec la société Live Nation France une convention de mise à disposition de ce même stade pour la période du 15 au 21 juillet 2009 en vue de l’organisation d’un concert. Le 16 juillet 2009, au cours des opérations de montage de la scène de spectacle édifiée en vue de cette manifestation, la structure métallique de la scène s’est effondrée, occasionnant le décès de deux personnes. A la suite de cet accident, le match de football devant opposer, le 16 août 2009, l’Olympique Marseille et le Lille Olympique Sporting Club n’a pu avoir lieu au stade Vélodrome, mais s’est tenu au stade de la Mosson à Montpellier. La société Olympique de Marseille a demandé à la commune de Marseille de lui verser la somme de 1 003 325 euros en réparation du préjudice qu’elle estime avoir subi du fait de l’indisponibilité du stade Vélodrome le 16 août 2009. Par un jugement du 23 mai 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. La société Olympique de Marseille se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 6 mars 2020 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille, statuant sur renvoi après annulation d’un premier arrêt par une décision du Conseil d’Etat du 24 avril 2019, a rejeté l’appel qu’elle avait formé contre ce jugement.
- Pour juger que l’effondrement de la structure scénique prévue pour le concert et l’accident mortel qui s’en est suivi constituaient un cas de force majeure de nature à exonérer la commune de Marseille de toute responsabilité au regard du manquement aux obligations contractuelles résultant des stipulations de l’article 4.1 de la convention que celle-ci avait conclue le 1er juillet 2009 avec la société Olympique de Marseille, qu’elle a regardé comme établi dès lors que la commune n’a pas été à même de mettre le stade Vélodrome à disposition de cette société pour la rencontre sportive prévue le 16 août 2009, la cour administrative d’appel de Marseille s’est fondée sur la circonstance que l’effondrement de la structure scénique et l’accident mortel qui s’en est suivi n’avaient pas pour origine une faute de la commune de Marseille, laquelle était étrangère à l’opération de montage de cette structure, et résultaient de faits qui étaient extérieurs à cette commune et avaient le caractère d’un événement indépendant de sa volonté, qu’elle était impuissante à prévenir et empêcher. En statuant ainsi, alors que l’indisponibilité du stade, bien qu’elle résulte de fautes commises par la société Live Nation France et les sous-traitants de cette dernière dans le montage de la structure scénique, n’aurait pu survenir sans la décision initiale de la commune de Marseille de mettre le stade Vélodrome à disposition de cette société pour l’organisation d’un concert, la cour a inexactement qualifié les faits soumis à son appréciation.
- Il s’ensuit, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que la société Olympique de Marseille est fondée à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque.
- Aux termes du second alinéa de l’article L. 821-2 du code de justice administrative : » Lorsque l’affaire fait l’objet d’un second pourvoi en cassation, le Conseil d’État statue définitivement sur cette affaire « . Le Conseil d’État étant saisi, en l’espèce, d’un second pourvoi en cassation, il lui incombe de régler l’affaire au fond.
Sur la recevabilité de l’appel de la société Olympique de Marseille :
- En premier lieu, la présentation d’une action par un avocat ou un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ne dispense pas le juge administratif de s’assurer, le cas échéant, lorsque la partie en cause est une personne morale, que le représentant de cette personne morale justifie de sa qualité pour engager cette action. Une telle vérification n’est toutefois pas normalement nécessaire lorsque la personne morale requérante est dotée, par des dispositions législatives ou réglementaires, de représentants légaux ayant de plein droit qualité pour agir en justice en son nom. Il résulte des dispositions combinées des articles L. 225-64 et L. 225-66 du code de commerce applicables aux sociétés anonymes disposant d’un directoire et d’un conseil de surveillance, ainsi que, par renvoi, de celles mentionnées au 3° de l’article L. 122-2 du code du sport applicables aux sociétés disposant de tels organes, que le président du directoire ou le directeur général unique ainsi que, le cas échéant, le directeur général, sont investis des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société et représentent la société dans ses rapports avec les tiers. Ils ont ainsi, de plein droit, qualité pour agir en justice au nom de la société.
- Il résulte de l’instruction que M. Jacques-Henri Eyraud, président du directoire de la société Olympique de Marseille à la date du pourvoi qu’il a formé devant le Conseil d’Etat au nom de cette société, a conclu à ce que le Conseil d’Etat, réglant l’affaire au fond, fasse droit à la requête d’appel de cette société. Par suite, l’intéressé doit, en tout état de cause, être regardé comme s’étant approprié dans ce cadre les conclusions de cette requête. Il s’ensuit que le moyen tiré de ce que la société Olympique de Marseille n’aurait pas été représentée par une personne ayant qualité pour former l’appel objet de la présente instance doit être écarté.
- En deuxième lieu, aux termes de l’article R. 411-1 du code de justice administrative : » La juridiction est saisie par requête. La requête (…) contient l’exposé des faits et moyens, ainsi que l’énoncé des conclusions soumises au juge « . La requête d’appel présentée par la société Olympique de Marseille satisfaisant à ces exigences, la fin de non-recevoir soulevée par la commune de Marseille doit être écartée.
Sur la recevabilité de la demande formée devant le tribunal administratif par la société Olympique de Marseille :
- En premier lieu, il résulte de ce qui est dit au point 5 que M. A…, alors président du directoire de la société Olympique de Marseille, avait qualité pour introduire la demande soumise au tribunal administratif le 20 juin 2013.
- En deuxième lieu, aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ne peut être opposée à un requérant ayant introduit devant le juge administratif un contentieux indemnitaire à une date où il n’avait présenté aucune demande en ce sens devant l’administration lorsqu’il a formé, postérieurement à l’introduction de son recours juridictionnel, une demande auprès de l’administration sur laquelle le silence gardé par celle-ci a fait naître une décision implicite de rejet avant que le juge de première instance ne statue. Il résulte de l’instruction que la société Olympique de Marseille a demandé le 14 mars 2017 à la commune de Marseille de l’indemniser du préjudice qu’elle estimait avoir subi du fait de l’indisponibilité du stade Vélodrome pour la rencontre du 16 août 2009. Cette demande ayant été rejetée par le silence gardé par la commune de Marseille avant que le tribunal administratif statue, le 23 mai 2017, celle-ci n’est ainsi pas fondée à soutenir que la demande indemnitaire de la société Olympique de Marseille serait irrecevable faute de liaison du contentieux.
Sur la responsabilité contractuelle de la commune de Marseille :
- Aux termes de l’article 2 de la convention conclue le 1er juillet 2009 entre la commune de Marseille et la société Olympique de Marseille : » La convention a pour objet de déterminer les conditions dans lesquelles le stade Vélodrome est mis à disposition de l’OM pour l’organisation de ses rencontres programmées de football. La ville de Marseille conserve la disposition du stade Vélodrome et en assure l’entretien gros et menu, la gestion ainsi que l’exploitation des différentes activités susceptibles de s’y dérouler en dehors des périodes de mise à disposition prévues par la convention. « . Aux termes de l’article 4.1 de cette même convention : » La ville de Marseille met le stade Vélodrome à la disposition de l’OM pour l’organisation des rencontres programmées dans les conditions définies par la convention. L’OM est le » club résident » de football du stade Vélodrome, prioritaire en cette qualité pour l’utilisation du stade Vélodrome dans le cadre des rencontres officielles (…). La ville de Marseille prend les mesures appropriées pour que le stade Vélodrome puisse permettre l’organisation des rencontres officielles dans des conditions compatibles avec les normes impératives « . Selon l’article 1er de cette même convention, les » normes impératives » s’entendent de » toute règlementation ou norme impérative applicable aux enceintes sportives recevant du public émanant des autorités administratives compétentes ainsi que toute prescription ou décision en matière de sécurité des spectateurs et des sportifs édictées par les autorités nationales, européennes et internationales du football dont la mise en œuvre est nécessaire pour permettre l’organisation des rencontres de l’OM dans le stade « .
- Il résulte de l’instruction que le match devant opposer l’Olympique de Marseille au Lille Olympique Sporting Club le 16 août 2009, joué au titre de la deuxième journée du championnat de France de ligue 1, constituait une rencontre programmée au sens des stipulations de la convention citées au point 10. La commune de Marseille n’ayant pas été en mesure de mettre le stade Vélodrome à disposition de la société Olympique de Marseille en vue de cette rencontre sportive, cette dernière, qui s’est trouvée contrainte d’organiser la rencontre dans un autre lieu sans que cela résulte, contrairement à ce qui est soutenu en défense, de sa seule initiative, est fondée à soutenir que la commune de Marseille a manqué aux obligations mises à sa charge par les stipulations de l’article 4.1 de la convention conclue avec ce club sportif. En l’absence de stipulation ou, comme il a été dit au point 2 et contrairement à ce qu’a jugé le tribunal administratif, de circonstances relevant de la force majeure de nature à exonérer la commune de sa responsabilité contractuelle, la société Olympique de Marseille est fondée à demander la réparation du préjudice qui en est résulté pour elle.
Sur l’évaluation du préjudice :
- En premier lieu, il résulte de l’instruction qu’en raison des capacités d’accueil du stade de la Mosson, limitées à 32 900 places, la rencontre sportive organisée à Montpellier le 16 août 2009 s’est déroulée en présence d’un nombre de spectateurs notablement inférieur à celui qui aurait pu être accueilli dans le cadre d’un match organisé au stade Vélodrome à une telle période de l’année. Il y a lieu de déterminer le montant du préjudice qui en est résulté en se référant à la rencontre ayant opposé l’Olympique de Marseille et l’Association de la Jeunesse Auxerroise le 17 août 2008, laquelle est représentative, en termes de nombre de spectateurs, des matchs de l’Olympique de Marseille qui se sont déroulés au stade Vélodrome au cours des mois d’août des années 2006 à 2010. La perte de recettes qui en résulte peut être évaluée sur cette base à 308 780 euros hors taxes au titre de la vente de places aux spectateurs, somme à laquelle il convient d’ajouter un manque à gagner pouvant être estimé à 21 111 euros hors taxes au titre des prestations de restauration qui leur sont délivrées sur place et dont la société Olympique de Marseille bénéfice par convention à hauteur de 20 % et à 9 930 euros hors taxes au titre des pertes sur les ventes de places » VIP « . En revanche, les justificatifs produits par cette société sont insuffisants pour établir d’éventuelles pertes liées à l’exploitation de la boutique vendant sur place des produits à l’effigie du club.
- En deuxième lieu, il résulte de l’instruction qu’en raison de la délocalisation à Montpellier de la rencontre sportive qui s’est déroulée le 16 août 2009, la société Olympique de Marseille a exposé des frais de déplacement et d’hébergement pour ses salariés et les stadiers auxquels elle a recours. Elle justifie de ces frais à concurrence de la somme de 2 819 euros hors taxes, les autres dépenses de déplacement et d’hébergement dont la société demande l’indemnisation à ce titre n’étant assorties d’aucun justificatif ou concernant des personnels non répertoriés dans la liste des salariés du club versée au dossier par la société Olympique de Marseille et ne pouvant, par suite, être retenues. Il y a également lieu de l’indemniser des dépenses qu’elle a exposées pour une somme de 87 509 euros hors taxes aux fins d’assurer le transport de supporters à Montpellier.
- En troisième lieu, la société Olympique de Marseille expose avoir engagé une somme totale de 56 670 euros hors taxes pour l’achat d’encarts publicitaires destinés à informer le public de la délocalisation du match, pour le transport et l’entreposage au stade de la Mosson de matériels et de panneaux d’affichage publicitaires et pour l’achat de banderoles. Il résulte de l’instruction que ces dépenses ont directement été supportées pour l’organisation de cette rencontre sportive et doivent ainsi donner lieu à indemnisation.
- En quatrième lieu, il résulte de l’instruction qu’en raison de l’indisponibilité du stade Vélodrome le 16 août 2009, la société Olympique de Marseille a été contrainte de prendre à sa charge les frais inhérents à la location du stade de la Mosson à Montpellier pour une somme de 29 290 euros hors taxes. Elle est par suite fondée à demander à en être indemnisée.
- En cinquième lieu, la société Olympique de Marseille justifie avoir exposé des dépenses liées au recrutement de personnels intérimaires à Montpellier, pour la tenue du guichet ou des opérations de manutention, pour un montant dépassant de 18 860 euros hors taxes les charges habituellement supportées au titre de ces mêmes postes de dépenses lors des rencontres comparables organisées dans l’enceinte du stade Vélodrome. Cette somme doit par suite être prise en compte pour le calcul du montant du préjudice indemnisable.
- En sixième lieu, la société Olympique de Marseille n’établit pas que la délivrance gratuite aux abonnés de places pour un match contre le FC Copenhague et la parution gratuite, dans les publications du club, de publicité pour des partenaires qui ont pu être affectés par la délocalisation du match procèderait d’obligations contractuelles à l’égard de ces personnes et non de choix commerciaux de sa part. Il n’y a, par suite, pas lieu d’en tenir compte pour déterminer le montant du préjudice ouvrant droit à indemnisation.
- En septième lieu, l’indemnisation à accorder à la société Olympique de Marseille doit être réduite à hauteur des dépenses dont elle a été dispensée pour la location du stade Vélodrome du fait de cette délocalisation. Celles-ci doivent être évaluées, sur la base de la même hypothèse de fréquentation que celle retenue au point 12, à 73 082 euros hors taxes.
- Il résulte de tout ce qui précède que la société Olympique de Marseille est fondée à soutenir que la commune de Marseille doit être condamnée à lui verser, à titre d’indemnité, une somme qu’il y a lieu de fixer à 461 887 euros. La société Olympique de Marseille a droit, ainsi qu’elle le demande, aux intérêts au taux légal afférents à cette indemnité à compter du 20 juin 2013, date à laquelle elle a saisi le tribunal administratif de Marseille. La capitalisation des intérêts ayant été demandée par cette société à la même date, il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 20 juin 2014, date à laquelle était due pour la première fois une année d’intérêts ainsi qu’à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Sur l’appel en garantie de la société Live Nation France :
- En premier lieu, la commune de Marseille n’ayant pas expressément abandonné, dans l’instance ayant donné lieu à l’arrêt attaqué, rendu par la cour administrative d’appel sur renvoi après annulation d’un premier arrêt par une décision du Conseil d’Etat du 24 avril 2019, les conclusions qu’elle a formées devant le tribunal administratif tendant à ce que la société Live Nation France soit condamnée à la garantir des indemnisations mises à sa charge, le Conseil d’Etat, réglant l’affaire au fond après annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel, demeure, contrairement à ce que soutient cette société, saisi de ces conclusions, la circonstance que celle-ci n’ait pas été partie à l’instance ayant donné lieu à la décision précitée du Conseil d’Etat étant dépourvue d’incidence à cet égard.
- En deuxième lieu, la circonstance que la société Olympique de Marseille n’a formé aucune demande tendant à la condamnation de la société Live Nation France à l’indemniser du préjudice qu’elle a subi à raison de l’impossibilité d’organiser au stade Vélodrome la rencontre programmée le 16 août 2019 est sans incidence sur la recevabilité de l’appel en garantie formé par la commune de Marseille à l’égard de cette société. Par ailleurs, ayant été formé le 18 octobre 2016, soit moins de cinq ans après la requête par laquelle la société Olympique de Marseille a sollicité la mise à la charge de la commune de Marseille de l’indemnisation contre laquelle cette commune demandait à être garantie, la société Live Nation France n’est pas fondée à soutenir que cet appel en garantie serait atteint par la prescription prévue par l’article 2224 du code civil.
- En troisième lieu, aux termes des stipulations de l’article 6 de la convention de mise à disposition du stade Vélodrome pour le concert devant se tenir le 19 juillet 2009, » La société Live Nation France organisatrice de la manifestation est responsable des dommages de toute nature pouvant survenir du fait ou à l’occasion de l’exécution de la présente convention « . Par suite, nonobstant les manquements qui auraient pu être commis par les sous-traitants auxquels a recouru la société Live Nation France pour le montage du dispositif scénique prévu pour la tenue du concert, il y a lieu d’accueillir les conclusions de la commune de Marseille tendant à ce que cette société soit appelée en garantie. En l’absence, au vu de l’instruction, de négligences de la commune de Marseille de nature à atténuer les responsabilités incombant à la société Live Nation France en application des stipulations précitées, cette société garantira la commune du montant total des sommes mises à sa charge par la présente décision.
- Il résulte de tout ce qui précède que la société Olympique de Marseille est fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête et à demander la condamnation de la commune de Marseille à lui verser, en réparation du préjudice qu’elle a subi, une somme de 461 887 euros assortis des intérêts au taux légal à compter du 20 juin 2013, ces intérêts étant capitalisés à compter du 20 juin 2014 ainsi qu’à chaque échéance annuelle à compter de cette date, la commune étant elle-même fondée à demander à être garantie par la société Live Nation France de la totalité des sommes mises à sa charge.
Sur les frais de l’instance :
- Il y a lieu dans les circonstances de l’espèce de mettre à la charge de la commune de Marseille la somme de 6 000 euros, à verser à la société Olympique de Marseille, pour l’ensemble de la procédure, au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce que des sommes soient mise à ce titre à la charge de cette société, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L’arrêt du 6 mars 2020 de la cour administrative d’appel de Marseille et le jugement du 23 mai 2017 du tribunal administratif de Marseille sont annulés.
Article 2 : La commune de Marseille est condamnée à verser à la société Olympique de Marseille une indemnité de 461 887 euros qui portera intérêts au taux légal à compter du 20 juin 2013. Les intérêts échus à la date du 20 juin 2014, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : La société Live Nation France garantira la commune de Marseille du montant total des condamnations prononcées à son encontre.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Olympique de Marseille est rejeté.
Article 5 : La commune de Marseille versera à la société Olympique de Marseille une somme de 6 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code justice administrative.
Article 6 : Les conclusions présentées par la commune de Marseille et la société Live Nation France au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 7 : La présente décision sera notifiée à la société sportive professionnelle Olympique de Marseille, à la commune de Marseille et à la société par actions simplifiée Live Nation France.
Composition de la juridiction : M. Jonathan Bosredon, Mme Karin Ciavaldini, HAAS ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN